Genèse

Les épreuves surmontées  |  La naissance de l'Université Quisqueya

Photo d'un des premiers locaux de l'Université Quisqueya

 

Les épreuves surmontées

L'Université Quisqueya est née et s'est développée dans un contexte général difficile. Pour quatre raisons principales:

1. Une longue crise sociopolitique qui a duré près de 25 ans (1983 - 2008). Au cours de cette période, le pays a connu plus de quatorze gouvernements, cinq coups d'État accompagnés à chaque fois de centaines d'assassinats, de violences, de destructions et d'actes de pillage, le départ en exil de plusieurs Chefs d'État, pas moins de sept opérations de paix des Nations Unies entre 1993 et 2014, etc. L'instabilité devenue chronique, les crises à répétition ont provoqué aussi, à certains moments, le gel de la coopération des bailleurs de fonds internationaux avec l'État haïtien, aggravant ainsi les conditions de vie de la population et rendant plus difficile le fonctionnement du pays.

2. Une situation macro-économique très dégradée. De la fin des années soixante-dix à 2005, la croissance économique réelle est en moyenne de seulement 0,34 % par an.  A la suite du coup d'État de septembre 1991, le PIB a baissé de 20% en 1992 et en 1993 (période charnière pour l'UniQ). En 1994, la baisse cumulée du PIB a atteint 30%, contrastant avec l'expansion continue de l'économie latino-américaine. L'embargo commercial total décidée par l'ONU, est entré en vigueur en mai 1994, affectant gravement la vie économique d'Haïti. L'emploi ne représente plus que 18% de son niveau de 1991, soit une perte d'environ 36000 emplois directs. Quant à l'inflation qui avait connu un niveau déjà élevé en 1992-1993 (25%), elle atteint des sommets un an plus tard (50%). En 2002-2003, le pays a exporté à peine 13% de son PIB et est devenu dépendant des importations pour subvenir aux besoins alimentaires de sa population. Tous les secteurs (industriel, secondaire et agricole) sont frappés par une diminution de leurs activités et le manque d'investissements productifs.

3. Des catastrophes naturelles majeures. Au cours des dix dernières années, des pluies torrentielles ont provoqué des inondations majeures et des destructions dans le département de l'Ouest et dans la capitale.  Quatre cyclones ont ravagé le pays au cours du seul mois de septembre 2008. En janvier 2010, certaines régions du pays et tout particulièrement la ville de Port-au-Prince ont été dévastées par un terrible tremblement de terre (suivi d'un second séisme le 20 janvier), classé comme l'une des plus grandes catastrophes naturelles au monde par l'ampleur des pertes humaines, le nombre de blessés et les destructions matérielles (dommages estimés à 7,8 milliards de dollars américains). Tous les bâtiments de l'UniQ flambant neufs, inaugurés le 20 décembre 2009, ont été anéantis en quelques secondes. En 2012, les ouragans Isaac et Sandy ont apporté eux aussi leur lot de malheurs (200 000 personnes sans abri). En septembre 2016, l’ouragan Matthew a ravagé le Grand Sud, une catastrophe qui a eu - en termes de destructions - un impact aussi grave que le séisme.

4. L'enseignement supérieur parent-pauvre de la Nation. En 1993-1994, l'éducation est l'un des secteurs qui a le plus souffert de la crise politique et de l'embargo international, du fait du caractère durable des dégâts engendrés. La part du budget national consacrée à l'éducation n'a cessé de s'amenuiser au cours de ces années. De façon générale, chaque crise ayant pour conséquence de diminuer le pouvoir d'achat de la classe moyenne, les ressources de l'Université Quisqueya (qui ne reçoit aucune subvention de l'État) ont été directement affectées, alors que l'enseignement supérieur nécessite des investissements et des budgets de fonctionnement importants (enseignants-chercheurs à plein temps, qualifiés, création et équipement de laboratoires, infrastructures modernes). Il faut aussi mentionner comme conséquences des crises l'exode des familles solvables ou le départ de leurs enfants vers des universités étrangères (au Canada, aux États-Unis, en République Dominicaine, en Europe). Enfin, il faut mentionner le désintérêt de l'État vis-à-vis de l'enseignement supérieur et la prolifération anarchique d'établissements privés (187!). La très grande majorité de ces établissements fonctionnent en effet sans autorisation de l'État (plus de 120), et scolarisent pourtant, malgré leur médiocrité, environ 25000 étudiants (soit le quart de la population étudiante du pays). Par ailleurs, le nombre d’étudiants haïtiens scolarisés dans les universités dominicaines est estimé à 25000.

En dépit d'un tel environnement aussi dégradé que dégradant, l'UniQ s'est rapidement affirmée comme l'université privée la plus performante et la plus prestigieuse d'Haïti.

En résumé, pour vivre, survivre et se développer, l'Université Quisqueya a été obligée de mener un combat incessant pour relever les défis extérieurs qui se sont imposés à elle au fil des années et qui ne relevaient pas de sa propre gouvernance: troubles politiques et sociaux, climat de violence, problèmes économiques, catastrophes naturelles, sans parler des soucis d'approvisionnement en électricité, en eau, de la difficulté à trouver sur place des enseignants et des chercheurs de haut niveau, de l'absence de matériels didactiques, entre autres. L'ensemble de ces faits ont eu pour conséquence de rendre plus difficile la croissance de l'établissement. De 2003 à 2008, les effectifs de l'UniQ sont passés graduellement de 2009 à 1258 étudiant(e)s, et sont remontés ensuite régulièrement jusqu'à atteindre aujourd'hui le chiffre de 3200 étudiant(e)s, si l'on excepte la tragique parenthèse du séisme où l'effectif est tombé à 721 étudiant(e)s.

Seule, la volonté de ses responsables de construire une université d'excellence dans l'intérêt des étudiants et du pays, en dépit de toutes les épreuves, explique ce parcours hors normes, hors du commun, à proprement parler "extra-ordinaire". Il s'agit à présent d'en retracer les grandes étapes.

 

La naissance de l'Université Quisqueya

Conscients de la faible capacité d'accueil des institutions d'enseignement supérieur public, préoccupés par le risque de prolifération en Haïti d'écoles supérieures, à visée purement mercantile, et surtout alarmés par la dégradation accélérée de la qualité des études universitaires, sept professeurs et chercheurs haïtiens en activité soit au pays, soit à l'étranger ont ressenti en octobre 1987 le besoin de conjuguer leurs efforts pour contribuer au relèvement de l'enseignement supérieur national. Après avoir réalisé une évaluation de la situation générale, ils ont créé en mars 1988 l'Université Quisqueya, bien connue aujourd'hui sous son sigle «UniQ».

Dans l'Acte Constitutif signé par les Professeurs Jacques Édouard ALEXIS, Antoine AMBROISE, Ariel AZAËL, Laënnec HURBON, Jean MOISSET, Lionel RICHARD et Paul SAINT-HILAIRE, il est écrit: «Le but fondamental de l'UniQ est de contribuer au relèvement de la qualité de l'Enseignement Supérieur en Haïti» (article 6).

Ces sept universitaires font partie de la première génération des fondateurs de l’UniQ.

Il n’est pas sans intérêt de mentionner l’apport inestimable de nombreux compatriotes et amis étrangers dont les talents et l’énergie créatrice ont permis de faire connaître l’UniQ dans le cadre des divers travaux et débats des commissions de planification académique et administrative. On peut également noter le soutien dès le départ de:

• L’Institut Inter-américain de Coopération Agricole (IICA) qui a fourni et accueilli pendant plus d'une année le secrétariat technique des membres fondateurs ;

• L’USAID qui a financé la grande enquête réalisée à travers le pays en 1988 pour recueillir l'avis des parents et des étudiants potentiels quant à l’idée d’une nouvelle université en Haïti ;

• L’AUPELF-UREF, aujourd’hui Agence Universitaire de la Francophonie (AUF), qui a pris en charge un certain nombre de missions de planification ;

• La Mission Française de Coopération et d’Action Culturelle qui a financé la mise en place du Bureau de Planification et le déroulement des trois premières années de la vie opérationnelle de l’UniQ.

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