Mot de ComUniQ pour la rentrée 2019S

Chères étudiantes, chers étudiants, il est difficile d’oublier le contexte général dans lequel cette session a commencé. Les temps sont troublés. Mais, oublions un instant cette réalité, si vous le voulez bien. Je veux vous parler de vous.

Ça y est, c’est fait, vous êtes rentré(e)s. Pour les nouveaux, je dirais que vous êtes entré(e)s dans le grand tunnel des études universitaires, avec la lumière de la sortie tout au bout. De grandes quantités de connaissances à acquérir, des méthodes à assimiler, des amis à découvrir, des joies et des soucis de toutes sortes. Vous êtes résignés, mais aussi armés de courage. Il faut ce qu’il faut. Vos parents vous l’ont assez dit : c’est important, les études, parce que, dans la vie, il faut un diplôme pour avoir un bon emploi qui rapporte. Si vous voulez un bel avenir, vous devez réussir à l’université.

C’est ainsi que tout le monde vous présente ça?; l’université, c’est comme l’école, c’est important pour plus tard. On vous vend ça, comme on vous vend un gros traitement chez le dentiste. Ça va faire mal, vous allez avoir des broches, ce ne sera pas facile pour manger du blé d’Inde, mais plus tard, vous verrez, vous aurez un beau sourire, vous serez contents. En attendant, endurez !

Moi, je souhaite juste vous dire une chose : n’allez pas à l’université pour plus tard, allez-y pour tout de suite ! Peu importe vos notes, l’important, c’est de chanter.

L’université, ce n’est pas seulement un avenir, l’université, c’est surtout un présent. Un présent qui dure longtemps. Un présent qui vous mène autour de 24-25 ans. On ne peut pas vivre tout ce temps en attendant. En attendant que ça finisse. En attendant sa Licence ou son Master. En attendant d’être dans le vrai monde. L’université, tout comme l’école, c’est un vrai monde. N’y allez pas pour vous trouver une place après, allez-y pour vous faire une place maintenant.

Tous les adultes ont le même regret. On fait tous la même erreur : on va à l’université pour en sortir. Et quand on en sort, on se rend compte que ce n’était pas si mal, finalement. On referait tous le même parcours, mais autrement. En profitant de chaque journée. A fond !

Car le concept est attrayant. Réunir des jeunes en un endroit pour leur apprendre ce que le monde sait. La passation du savoir, la transmission des connaissances et des savoir-faire. Ça a pris des milliers d’années pour que la race humaine comprenne que la terre est ronde. Aujourd’hui, en un seul cours, l’affaire est réglée. Il faut juste ne pas être parti aux toilettes. Je sais, on vous bombarde de matières, et vous vous demandez à quoi ça sert. Vous dites : à quoi ça sert le cours de philosophie, si je veux être ingénieur?? Le cours de biologie, c’est pour devenir médecin, le cours d’histoire, c’est pour devenir « quelqu’un ». Or, vous ne deviendrez pas quelqu’un dans 5 ans, vous êtes déjà quelqu’un ! Et ce, à partir du moment où vous en êtes conscient et persuadé !

Bien sûr, vous pouvez me dire : pas besoin d’apprendre autant, j’ai tout dans mon téléphone. Il suffit de « googler ». Pas besoin d’apprendre en quelle année est né Léonard de Vinci, il suffit d’aller sur Wikipédia. Oui, mais l’important, ce n’est pas de savoir la date de sa naissance, l’important, c’est de savoir qu’il a existé. Connaître son apport à l’humanité, sa contribution au progrès scientifique. Pour googler quelque chose, il faut d’abord en avoir une idée, apercevoir cette chose. En avoir la curiosité.

La curiosité n’est pas dans votre cellulaire. La curiosité est en vous. C’est parce que vous êtes curieux de savoir ce que font vos amis que vous le prenez si souvent votre téléphone intelligent ! C’est parce qu’on est curieux de savoir ce que font les milliards d’humains que l’on va à l’école et à l’université.

Le premier réseau social, c’est le monde de vos condisciples. Les amis, auxquels vous allez envoyer des infinités de textos, c’est là que vous allez les trouver. L’université, ça reste le meilleur endroit pour découvrir et apprendre l’autre. D’abord, on a le choix. Il y a plein de gens autour de nous. Ils sont là, en vrai. Pas juste en photos. On ne peut pas les « swiper » comme sur Tinder. Ils restent là. Il y en a avec qui ça va cliquer. D’autres, pas du tout. Ce ne sera jamais seulement à cause de leur apparence. Quand on passe quatre ou cinq ans sur le même campus avec un camarade de promotion, on se rend au-delà de ça. Pour le meilleur ou pour le pire. Rien ne remplace la réalité physique, concrète des gens et des choses.

Donnez une chance à votre université. Ce n’est peut-être pas parfait. Mais c’est le meilleur endroit qu’on ait trouvé pour former de jeunes adultes toute la journée. Seul, dans votre chambre, devant un écran, à la longue, vous déprimez. À l’université, il y a plein de trucs qu’on n’aime pas, mais il suffit de trouver un truc qu’on aime : un sujet, un sport, une musique, un poème. Il y a aussi un lieu idéal pour lire et réfléchir : c’est la bibliothèque ! C’est une oasis pour l’esprit ! Allez-y, vous verrez, il y a beaucoup de livres nouveaux qui ont été donnés soit par la Bibliothèque nationale de France, soit par des fondateurs de l’UniQ, soit par des familles d’universitaires renommés, que ce soit en Haïti ou à l’étranger. Allez découvrir ces nouveautés !

Il y a deux réalités dont on ne se remet pas : la famille et la fac. Toutes nos aptitudes au bonheur et au malheur viennent de là. Tout notre amour et toute notre haine aussi. Plus les dirigeants et les citoyens  investiront dans la formation, dans les écoles et les universités pour vous permettre de vous épanouir, mieux la planète se portera. Il n’y a qu’une façon de changer le monde, c’est d’aller là où le monde est en train de changer. Où le corps grandit, où le cerveau se développe, où l’âme se déploie. C’est pendant la formation. Après, il est trop tard.

Prêtez attention aux activités que l’Université vous propose presque chaque semaine. Consultez notre nouveau site internet www.uniq.edu.ht et notre Lettre d’information « Les Brèves de l’UniQ ». N’oubliez pas que l’UniQ a pour mission l’enseignement, la recherche et le service à la communauté. Pendant tout le temps que vous passerez à l’Université Quisqueya, vous aurez donc dans chacun de ces domaines la possibilité de vous engager, de vous réaliser et de vous dépasser.

Bref, je sais, mon édito est déjà assez long, alors permettez-moi de me résumer : quand vous faites la rentrée à l’Université Quisqueya, n’y allez pas pour avoir une belle vie plus tard, allez-y pour avoir une belle vie dès maintenant. Il y a là assez d’intérêts pour que vous puissiez y trouver le vôtre.

Je connais plein d’adultes qui donneraient beaucoup pour être à votre place. Vous dites que ces adultes devraient profiter de leur présent, eux aussi. Vous avez raison. Mais c’est parce qu’ils ne l’ont pas fait lorsqu’ils le pouvaient, qu’ils ne sont plus capables de le faire maintenant.

Bonne année universitaire !

Prenez votre destin en mains, ne vous le laissez pas dicter par d’autres !  

Profitez de chaque journée, de chaque heure, de chaque seconde?! 

 

D’après un texte de Stéphane Laporte, journaliste canadien La Presse à Montréal

Adaptation : Alain Sauval, Directeur de ComUniQ


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