Fabrication des bidonvilles dans les pays du Sud : jeux d’acteurs et modalités d’habiter. Le cas du quartier de Canaan (Port-au-Prince-Haïti)

Neptune Prince

Ecole Doctorale Société et Environnement (EDSE) / Université Quisqueya
30/06/2021
Thèse


https://doi.org/10.54226/uniq.edse.18793

Résumé

En 2018, on estimait à 300 000 le nombre de bidonvilles existant dans le monde et  à 42% la population qui y vivait. 80 % de l’effectif se trouvaient dans les pays du Sud. Situés  dans des espaces délaissés proches des villes, les bidonvilles suscitent des interrogations tant  comme fait urbain incontournable que comme des territoires à risques naturels et  anthropiques. En Haïti comme dans les pays du Sud, l’augmentation de la population urbaine  se traduit surtout par la croissance des bidonvilles : 17 en 1950 et environ 400 en 2020. Les  travaux sur les bidonvilles sont très nombreux et investiguent surtout les questions de  l’habitat, l’occupation foncière, la précarité, l’habitant. Mais peu de travaux et d’approches les  mobilisent pour aborder la fabrication progressive des bidonvilles. Cette thèse interroge les modalités d’appropriation foncière, d’auto-fabrication et les modes d’habiter ainsi que le jeu  d’acteurs dans l’évolution des bidonvilles par le biais des « tactiques habitantes1». Les  observations, les collectes de données réalisées sur le quartier de Canaan, notre terrain  d’étude, ainsi que l’analyse du processus de bidonvilisation de la RMP2ont permis de mettre  en évidence des phases successives de ce que nous appelons « faire ville et/ou quartier a  posteriori ». En effet, si les populations de ces territoires s’installent, auto-construisent leurs  habitats ; on constate qu’au bout d’un temps relativement long, il y a une forme de  « normalisation » voire de reconnaissance à postériori de ces quartiers par les pouvoirs  publics. C’est le cas du quartier de « Saint-Martin », créé en 1925 et devenu la ville de  « Delmas » en 1982. A contrario, les villes planifiées sont conçues à partir de la maitrise  foncière, de l’aménagement de l’espace suivi par la viabilisation, des programmes de  construction avant que les pouvoirs publics envisagent enfin d’installer la population. A  l’inverse de ce processus, la création des « villes a posteriori » se fait à partir de  l’établissement spontané des populations sur des terrains souvent déclassés, de l’auto organisation, de l’auto-construction d’habitat provisoire se consolidant graduellement au fur  et à mesure des rentrées d’argent, etc. Les petits commerces de proximité et le déploiement  des réseaux techniques urbains se développent progressivement avant que les pouvoirs  publics interviennent pour formaliser « a posteriori » cette situation urbaine de fait. In fine,  nous défendons la thèse de l’existence d’une inversion de modalité de « faire la ville » que  nous désignons par « l’urbanisme inversé » qui correspond à ce que nous avons observé tant  en Haïti qu’au Brésil et au Pérou. En effet, dans les 3 cas, certains bidonvilles deviennent au  bout de 30 à 40 ans soit des territoires intégrés à la politique de la ville au même titre que les  villes planifiées ou des quartiers ou des « villes a posteriori ».

 

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Domaine(s) de Recherche: Études urbaines / Urbanisme

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