Renforcer la disponibilité des fourrages pour l’alimentation animale à Saint-Michel de l’Attalaye

Gardy Saint-louis

Faculté des Sciences de l'Agriculture et de l'Environnement (FSAE) / Université Quisqueya
02/02/2022
Article


À Saint-Michel de l’Attalaye, les agriculteurs font face à une sévère carence en fourrages, en particulier pendant la période de soudure (décembre à avril). Cette situation peut affecter la productivité et la santé des animaux d’élevage destinés à la production de viande, de lait ou utilisés comme force de travail. 

Les effets du changement climatique, entraînant une prolongation de la période de sécheresse, en constituent la principale cause. Dans cette commune, les premières précipitations annonçant le début de la saison des cultures intervenaient couramment à la fin du mois de mars. Depuis une vingtaine d’années, ces pluies sont recensées à la fin du mois de mai. Ce décalage de deux mois environ, entraîne une réduction de la période de culture et, conséquemment, une baisse des disponibilités fourragères.

Pour une meilleure compréhension du problème, le consortium Chibas-UniQ-CIRAD a réalisé un diagnostic agro-socio-économique dans la commune de Saint-Michel (version finale octobre 2021). Ce travail scientifique a été renforcé par les données d’une enquête récente menée par les chercheurs du Chibas en septembre 2021 sur l’alimentation animale.  Trois causes ont été identifiées comme étant à la base de ce manquement  :

1— La disparition du sorgho dans les systèmes de culture depuis bientôt 10 ans à cause des attaques du Pichon jaune (melanaphis sp)

2 — Persistance et rallongement de la saison sèche (deux mois en plus)

3— Absence de pratiques de conservation de fourrage

Que les planteurs-éleveurs soient dans des zones semi-arides comme le Bas-de-Sault, ou humides comme Platana, la période d’abondance en fourrage est comprise entre mars et novembre.

Pendant cette période, ils peuvent compter sur la disponibilité en herbes comme les « kòdagrenn (Dicanthium caricosum), zèb 3 pye, herbe de Guinée (Panicum maximum), zèb fen, zèb kòs, madan michel (Themeda quadrivalvis L), zèb bon gazon, panache, pangòl (Digitaria decumbens) et afio (Cyperus esculentus) » pour nourrir les bovins et les caprins.

Il y a également abondance des feuillages comme « Gommier (Bursera simaruba), leucaena (Leucaena_leucocephala), papay mawon (Cnidoscolus aconitifolius), bois d’orme (Guazuma ulmifolia Lam), siwèl (Spondias purpurea), mombin (Spondias monbin), etc », qui participent aussi à l’alimentation des animaux tout comme certains sous-produits de récolte tels que « fanes de sorgho (Sorghum bicolor), fanes de maïs (Zea mays L), fanes d’arachides (Arachis hypogaea), bouts blancs de canne (Saccharum officinarum), stipes et feuilles de bananier (Saccharum officinarum) ».

Cependant, la diminution des pluies entre novembre et avril, période de soudure, engendre un manque d’herbes fraîches. Habituellement, pendant cette période, ils ont recours aux feuillages pour nourrir leur cheptel.

Pour renforcer la disponibilité des fourrages, les chercheurs ont proposé :

Solution  1 : De continuer le travail de la recherche variétale pour un retour du sorgho dans les systèmes de culture (Récolte à partir de janvier et principal déchet de culture pour l’alimentation des herbivores pendant la période de soudure). 

Solution 2 : De poursuivre les essais sur l’adaptabilité des différentes variétés par le Chibas (Tinen2, Baton moyiz, etc); 

Solution 3 : De renforcer le peuplement des arbres et arbustes fourragers. Constituant une réserve importante pour l’alimentation des animaux en période de soudure, les arbres et arbustes fourragers peuvent être intégrés en bordure des champs ou sur les courbes de niveau en vue d’augmenter la biomasse fourragère; 

Solution 4 : D'augmenter la biomasse de certaines espèces fourragères telles que « herbe de Guinée, zèb kòs, Madan Michel, zèb 3 pye, zèb fen » et ensuite analyser et renforcer les pratiques innovantes de conservation de fourrages. Des techniques de fabrication de foin et de blocs multi-nutritionnels vont être expérimentées et vulgarisées.

Les résultats attendus et délais : 

D’abord à court terme : la réalisation des recherches sur l’adaptabilité des différentes variétés de sorgho dont les « fanes » sont des ressources alimentaires pour les animaux; 

À moyen terme : mettre en place des réserves constituées d’arbres et arbustes fourragers et maîtrise des techniques de conservation et de compléments alimentaires ( blocs sanitaires); 

À long terme : la réalisation de mémoires d’étudiants sur les pratiques d’alimentation des herbivores en vue d’ajuster les apports des rations en quantité et en qualité.

Toutefois le développement et la vulgarisation de techniques innovantes pour une amélioration dans la disponibilité des fourrages durant la période de soudure auraient des effets immédiats sur la productivité et la santé des animaux, et en particulier sur les revenus des éleveurs. 

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Domaine(s) de Recherche: Agriculture

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