Expansion de la Surface Agricole Utile (SAU) de la canne à sucre à Saint-Michel-de-l’Attalaye face au changement climatique

Gardy Saint-louis

Faculté des Sciences de l'Agriculture et de l'Environnement (FSAE) / Université Quisqueya
11/03/2022
Article


A Saint-Michel-de-l’Attalaye, la culture de la canne à sucre a toujours été une culture de rente fiable pour les agriculteurs. Dans ces contrées où l'on plante principalement de la canne à sucre, d’autres espèces sont aussi cultivées, mais elles sont destinées à l’autoconsommation des ménages agricoles.  Face aux conditions changeantes du milieu, la canne à sucre s’est imposée comme une espèce alternative et adaptée au changement climatique, ce qui explique l’augmentation de la SAU de cette culture au niveau de chaque section de la commune de Saint-Michel (Paul et al., 2021). 

L’agriculteur de Saint-Michel a toujours fait preuve de prudence en pratiquant la polyculture, incluant la canne à sucre afin d’avoir un revenu étalé dans le temps pour mieux gérer les risques climatiques. En ce sens, face aux impacts des changements climatiques, certaines espèces sensibles aux fortes chaleurs, comme le haricot, ne sont plus cultivées, souligne l’agronome Joseph.

Aujourd’hui, les données statistiques montrent que les surfaces cultivées en canne à sucre augmentent considérablement. Selon les résultats du recensement général de l’agriculture (MARNDR, 2009) et le diagnostic agro-socio-économique de la commune de Saint-Michel (Paul et al., 2021), ces deux études ont montré que la SAU de la canne est en nette progression et avec une forte incidence au cours des 10 dernières années. 

Cette mesure de mitigation face aux changements climatiques diminue le risque de perte de la campagne de production et améliore le revenu des ménages car la canne-à-sucre représente une culture industrielle, le clairin dérivant du jus de la canne étant très apprécié par les consommateurs haïtiens. 

De façon détaillée, ce graphique montre l'évolution de la SAU par section de 2009 à 2020 au niveau des différentes sections communales. Cette tendance est similaire au niveau de toutes les sections, mais elle est très marquée à La Cedras et Platana qui, au départ, ne sont pas des zones réputées pour la production de la canne à sucre.  

Cette augmentation des surfaces cultivées en canne est le résultat des effets du changement climatique qui affecte la zone, selon le chercheur Evens Joseph. Aux dires de ce dernier, le changement climatique empêche les paysans de continuer à pratiquer certaines cultures à cause du décalage que cela occasionne dans les saisons pluvieuses. Cela implique l’abandon de la culture de certaines espèces comme le haricot et la réduction de la SAU pour certaines autres, notamment le pois inconnu, le pois de souche et l’arachide. Contrairement à ces espèces, la SAU du pois congo et de la canne à sucre augmente, ce qui laisse croire que ces deux espèces répondent très bien aux variations climatiques.  

Outre le fait qu’elle soit une culture industrielle et une espèce de résistance,  l’exploitation de la canne à sucre aide les paysans à trouver les fourrages nécessaires pour le bétail dans les périodes de soudure. L'extension de la culture de la canne à sucre n'a pas seulement pour cause le changement climatique. Elle est aussi favorisée par le marché du clairin Saint-Michel qui se vend bien sur le marché national où la consommation d'alcool est en pleine expansion.

La canne à sucre a également bénéficié de résultats de recherche importants dans le passé qui l'ont permis de faire face à la maladie du charbon. De nouvelles variétés résistantes (canne Madan Mevs, canne 24, canne Madan Blanc) à la maladie ont été vulgarisées dans la commune.

L'extension de la canne à sucre à Saint-Michel-de-l'Attalaye a surtout bénéficié de l'innovation que représente le moulin mobile qui a permis une valorisation plus facile des productions. En effet, dans beaucoup de localités de la commune où le transport de la canne est peu aisé, l'arrivée du moulin mobile sur les parcelles de production facilite la transformation et la vente. Car le producteur de canne tire plus de revenus de la vente du sirop, que de la vente de canne. De plus, ce début de transformation à la parcelle rendue possible par le moulin mobile n'est pas sans avantages pour la fertilité des sols, puisque les résidus restent  sur la parcelle.

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Domaine(s) de Recherche: Agriculture / Politique / Sciences de l'Agriculture

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