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Aliette Prophète

Août 2015, en plein milieu des examens d’admission à l’UniQ, Aliette apprenait qu’elle allait devoir se sevrer de la FSED, une FSED où elle est aimée sinon adulée de tous : étudiants, professeurs et personnel. Elle passait ainsi du grade de Secrétaire académique à celui de Registraire. Comme il s’agissait là d’une promotion, on était tous contents pour elle ; elle l’avait plus que méritée. Mais, cette joie naturelle qui explose et qui est visible à mille lieues dans les yeux de ceux qui sont promus en général ne se lisait guère sur son visage. Elle aurait préféré ne jamais partir. Son désintéressement à rude épreuve, une fois encore, une fois de plus, ne s’était pas trahi.  Mais, femme d’engagement, elle s’y fut résignée, commandée comme toujours par le devoir.

Et l’absence ingrate a fait le reste puisque depuis son départ, il n’y a pas eu de communication réelle entre la FSED et elle-même. Le temps passe vite, on apprenait de temps en temps qu’elle ne se portait pas bien. Mais, entre le fait de lui passer un coup de fil et son stoïcisme dans le malheur, les nouvelles restaient vagues et les informations ne circulaient pas… jusqu’à ce matin où on apprit qu’elle avait passé l’arme à gauche. Aucun remue-ménage à la FSED ! Personnage effacé mais profond, se donnant à fond et aimant ce qu’elle fait, Aliette est la personne d’une entrée et d’une sortie pour la journée. Comment restituer le personnage à ceux qui ne l’ont pas connue ? La tâche n’est pas facile et il y a deux raisons à cela.

La première est qu’Aliette a disparu des radars de la FSED depuis cette nomination au VRAAC en août 2015, ce qui fait que l’écrasante majorité tant des professeurs que des étudiants de la FSED et le personnel ne la connaît pas. À moins qu’il ne s’agisse peut-être d’étudiants libres, on ne se rend pas au VRAAC par piles et par paquets.

La deuxième est que les gens ont cette étonnante habileté de trouver tellement de qualités aux gens après leur mort qu’il leur arrive tout naturellement et c’est connu de tous, de transformer des loups en moutons, des sots en sages, d’éternels intéressés en personnes désintéressées… À bien réfléchir, il aurait été juste et bon de se taire pour ne pas avoir l’air d’inventer des qualités à Aliette de peur de se conformer aux normes comme fait Monsieur et Madame Tout le monde.

Mais, tous ceux qui ont connu Aliette le savent. Aliette est la femme de toutes les qualités. D’ailleurs, fille de cultivateur à Ouanaminthe, l’agronome qu’elle est, est devenue secrétaire académique, non parce qu’elle n’a pas pu trouver mieux ailleurs, mais parce qu’après avoir obtenu son diplôme, elle s’est rendu compte que le métier d’agronome n’avait plus l’allure qu’elle lui connaissait avant : « aller de ferme en ferme tout en communiant avec la terre et travailler aux côtés des paysans afin de les aider à grandir ». Après avoir posé l’équation du troc constituant à échanger bureau contre bureau (bureaux de l’UniQ et bureaux des ONG pour professer son métier d’agronome), elle la résolut en optant et en donnant sa préférence aux bureaux de la FSED à l’UniQ, puisqu’elle a étudié dans cette université de Septembre 1991 à juin 1999. Aliette Prophète, un prototype comme on n’en voit plus de nos jours !

Elle a intégré la FSED en septembre 1999, en qualité de secrétaire académique. A l’époque, il y avait déjà une secrétaire administrative à la FSED. Les deux firent la paire comme le veut l’usage, bien entendu dans le bon sens. Une dizaine d’années plus tard, la secrétaire administrative émigra au Canada avec son mari. Depuis, Aliette est restée pendant longtemps seule à la Faculté sans sourciller car elle aimait ce qu’elle faisait, officiant ainsi sous deux chapeaux : elle venait à l’université à 7 heures du matin et en repartait à 5 heures de l’après-midi, parfois à six heures du soir. Elle travailla ainsi jusqu’à la venue de Lude Miard. Aliette ne demande jamais rien. Son devoir est son champ de vision.

Elle aura donc été durant son passage à la FSED, la somme des qualités introuvables chez une seule et même personne : généreuse, humble, charitable, sincère, vraie, esclave des normes, respectable et respectueuse, désintéressée, aimable et serviable. Elle était aussi d’une gentillesse à toute épreuve. Laisser passer cette pousse d’humilité faite chair sans faire connaître aux actuels étudiants de la FSED ce que cette inconnue qui a passé 16 ans (sublime longévité !) à servir plusieurs milliers d’étudiants tout en gardant le sourire, consisterait à polluer l’image de cet être humain sans fard qu’on ne trouve pas aux quatre coins des rues.  

Pendant la tenue des examens d’admission, quand certaines personnes font des exigences pour être présentes le samedi, Aliette était sourde à tout, elle était toujours là où le devoir la commandait. Après le tremblement de terre, ALIETTE A OCCUPÉ À LA FOIS PENDANT UNE ANNÉE LA FONCTION DE SECRÉTAIRE ACADÉMIQUE ET ADMINISTRATIVE DANS DEUX FACULTÉS DIFFÉRENTES : LA FSED ET LA FSJP. 

Dans les nouveaux locaux de l’université à Turgeau, Aliette allait faire de l’UniQ le centre et le projet de sa vie. En septembre 2006, elle entreprit des études de Master en Gestion de Projet à la FSEA, cycle d’études qu’elle boucla en 2008. Avec ses activités de consortium (sòl par-ci, sòl par-là) de concert avec Bernadette, son amie de longue date au VRACC, elle investit dans l’entourage de l’université, ensuite à l’intérieur même de l’université. Elle construira plus tard sa propre maison dans l’environnement de l’université. 

Le Recteur Jacky Lumarque qui lui rendit souvent visite à l’hôpital durant ses derniers jours, lui demanda quelques jours avant sa mort, ce qu’il pouvait faire pour elle, elle pointa du doigt sa nièce Rose Fédia Prophète qui était là en lui disant, je veux un emploi pour ma nièce. Même en mourant, elle a gardé sa manière de vivre : LES AUTRES D’ABORD. C’était la dernière volonté de celle qui nous quitte. Bonne chance donc à toi Fédia, ta tante en mourant ne t’a pas oubliée. Montre-toi digne d’elle dans chacun de tes pas durant ton existence sur la terre, cohérente en tout et partout.

QUANT À TOI ALIETTE, INCONTESTABLE MÈRE DE TOUTES LES SECRÉTAIRES ACADÉMIQUES ET ADMINISTRATIVES À L’UNIVERSITÉ QUISQUEYA, NOUS NE MANQUERONS PAS DE TE DIRE QUE : 

À LA FSED, TU ES ET DEMEURES JUSQU’À CE LUNDI 30 MAI 2022, JOUR DE TES FUNÉRAILLES,  UN MODÈLE INÉGALÉ. ET À EN JUGER PAR LES DONNÉES DISPONIBLES ET LES PRONOSTICS ÉVENTUELS, AUCUNE COMPARAISON NE POINT À L’HORIZON. MERCI D’AVOIR MARQUÉ TON PASSAGE À LA FACULTÉ DES SCIENCES DE L’ÉDUCATION DE TON UNIVERSITÉ QUISQUEYA.

Pierre Eddy Cézar
Vice-doyen de la FSED

 


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